D. Ránki (© Emma Dantec/Orchestre philharmonique de Monte‑Carlo)
Monaco
Monte-Carlo (Auditorium Rainier III)
18/02/2024
Joseph Haydn : Sonate pour piano n° 31 en la bémol majeur, Hob. XVI:46
Claude Debussy : Images (Première et Seconde Séries) – Estampes
Franz Schubert : Impromptus, D. 899, opus 90
Dezső Ránki (piano)
Depuis trois ans, le Philharmonique de Monte‑Carlo organise mensuellement des récitals de piano. Pas d’orchestre sur scène, un unique Steinway. L’instrument en impose par sa forme, sa majesté, son aile relevée. Il exige un pianiste à sa mesure.
Avec cette série de récitals monégasques, on est dans du piano haut de gamme. Cette saison, on a déjà eu droit au pianiste macédonien Trpceski (qui est l’artiste en résidence de l’année à Monaco), à la jeune prodige Alexandra Dovgan, 16 ans, à Piotr Anderszewski. Le dernier récital a été donné par le Hongrois Dezső Ránki.
Voilà du beau piano. Du piano racé. Du piano noble.
Curieusement, Dezső Ránki ne fit pas une énorme différence de style dans son interprétation des trois compositeurs au programme, Haydn, Schubert et Debussy. On eut droit à la même rondeur de son dans les œuvres des trois alors qu’on aurait pu attendre un son plus timbré dans la musique du premier, plus velouté dans celle du second, plus transparent dans celle du troisième. Mais ce son était tellement beau que Dezső Ránki nous convainquit.
Sa Sonate en la bémol de Haydn eut grande allure. Ses Impromptus de Schubert furent d’une totale élégance – avec de beaux contrechants venus de la main gauche. Quant à sa longue série de pièces de Debussy, elle se transforma en balade poétique. Au bord de l’eau, il fit miroiter des « Reflets » d’une infinie délicatesse. Il nous conduisit au pays des « Pagodes » où teintent quelques accords exotiques. Il nous entraîna dans une « Soirée dans Grenade » pleine de couleurs. Lorsque la pluie se mit à tomber sur les « Jardins » de Debussy, on entendit l’eau ruisseler sur son clavier. Au milieu des notes de la douce ondée, il fit ressortir le contrechant de la chanson Nous n’irons plus au bois que Debussy a furtivement glissée dans la partition. Tout cela était beau et poétique.
Sur une scène sobrement éclairée où seule se détachait la blancheur de sa chevelure, le pianiste apparaissait un peu comme dans un rêve. C’en était un…
– André Peyrègne