Concert organisé avec le généreux soutien des Amis de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo
Monaco
Monte-Carlo (Auditorium Rainier III)
10 mars 2024
Gabriel Fauré : Pavane. Op. 50
Ludwig Van Beethoven : Concerto pour piano n°1 en do majeur. Op. 15
Igor Stravinsky : L’oiseau de feu (ballet complet version 1910)
Martha Argerich (piano)
Orchestre philharmonique de Monte‑Carlo, Charles Dutoit (direction)
©F.Nebinger
Quoi ? On dit que le 1er Concerto pour piano et orchestre de Beethoven est un « petit concerto » ? Mettez donc une reine au clavier et il se transforme aussitôt en « concerto de l’Empereur » !
Cette reine, nous l’avons entendue à Monaco : c’est la légendaire Martha Argerich. Oui, elle était là, devant nous, sur la scène de l’Auditorium Rainier III, la mythique, la fabuleuse pianiste, coiffée d’une cascade de cheveux gris, la pianiste dont l’image inonde les réseaux sociaux dans le monde entier ! Elle était là, celle qui a fasciné plusieurs générations d’auditeurs, celle qui, paraît-il, est octogénaire mais dont les doigts sont ceux d’une jeune femme, étincelants de virtuosité, de brio, d’énergie. Elle était là et, grâce à elle, le concerto de Beethoven devint grandiose.
Une autre personne a donné à ce concerto une allure impériale : c’est le chef d’orchestre Charles Dutoit. Lui aussi mérite d’être traité de légendaire. A 87 ans, après la mort de Seiji Ozawa, il est peut-être le dernier des grands chefs d’orchestre du monde. Au lieu de réunir un orchestre de poche comme on le fait souvent pour accompagner le 1er Concerto de Beethoven, il convoqua le Philharmonique de Monte-Carlo au complet. Il entoura de velours le jeu de la pianiste, alanguissant telle ou telle phrase pour mettre en valeur le moindre de ses ralentis, posant des pizzicatos délicats sur ses fins de phrase, réglant l’intensité de ses crescendos sur ceux de la soliste. On ne pouvait rêver plus bel accompagnement…
Et voilà qu’en bis, Martha Argerich transforma une Gavotte de Bach et les Jeux d’eau de Ravel en un festival de contrepoint et de contrastes.
Une standing ovation salua sa prestation. Il en fut de même à la fin de l’éblouissant Oiseau de feu de Stravinsky, dirigé ensuite par Charles Dutoit. Le travail de ce chef fut aussi admirable dans l’éclat que dans la précision. L’oiseau était de feu, l’orchestre aussi. A tous ses pupitres jaillissaient de flamboyants solos : ceux, entre autres, du violoniste David Lefèvre, de la flûtiste Anne Maugue, du hautboïste Matthieu Bloch, du corniste Andrea Cesari. Le bassoniste Franck Lavogez entonna la berceuse qui est l’une des pages les plus célèbres de la partition. Le percussionniste Julien Bourgeois rythmait magistralement l’avancée de l’œuvre. L’histoire du ballet est celle d’un oiseau qui offre au fils du tsar l’une de ses plumes magiques. Ce soir-là, il y avait plus magique que la plume de l’oiseau de feu : la baguette de Charles Dutoit !
– André Peyrègne
©F.Nebinger